Chronique d'une nuit sans sommeil
Je commence la dernière journée de travail de la semaine et je tiens à peine debout. J'ai dormi deux heures et demi cette nuit. Comme à l'accoutumée, je prends ma douche vers 20h30. Ce moment de détente me permets de me laver de ma journée et me prépare à une nuit de sommeil. Cela tenait de l'exploit que je puisse la prendre aussi tôt puisque même après la journée de travail, nous avons le courage d'aller arpenter les rayons du supermarché du coin et de s'engouffrer dans les embouteillages. Mon chéri me donne la télécommande. J'ai compris, lui va s'écrouler. Ravie, je regarde une émission sur l'art Sumérien puis Le Bateau Livre.. éléments idéaux pour m'assoupir sereinement. 20h30 : réveil en sursaut : "oh, tu l'éteints la télé ?" me dit l'ours mal léché qui roupille à mes côtés. Je m'exécute en baragouinant que le ton étais limite désagréable et me retourne pour retourner dans mes rêves. Mais là, impossible. Je me laisse envahir par mes préoccupations. Et les larmes coulent. Non stop. En silence. Je n'ai pas envie de le réveiller et d'évoquer le sujet à cette heure-ci. Alors les pensées se bousculent : son divorce, notre futur bébé, l'hystéro, la PMA, la soirée de Noël, les paroles de belle-maman, mon isolement, … : tout ! Je n'arrive pas à stopper les larmes. 23h48 : je décide enfin de me lever. Je ne suis plus à cinq minutes près. Il faut que je descende. Une clope et un verre de jus de fruit me calmeront. J'entends Monsieur Chien gémir dans son panier. Lui aussi, il a un coup de blues ? Je vais le voir pour le réconforter. Je n'y arrive pas. Mais je renonce. Minuit passé, je retourne me coucher. C'est si bête d'avoir eu l'occasion de m'endormir tôt et d'avoir passé si bêtement le cap de minuit … Et je continue à tourner dans le lit, à psychoter aussi. Il faudra que je parle à mon homme rapidement. Je ne suis pas sûre de pouvoir assumer la PMA dans les semaines qui viennent. Je me sens trop fragile, pas assez en forme pour vivre une grossesse sereinement en assumant en parallèle ce divorce qui pourri de plus en plus. Je ne sais pas, j'hésite. Je vais sûrement laisser passer les fêtes. Les heures tournent. Je sais que je ne m'endormirai pas avant 1h00. Puis C'est 2h00 que je vois passer. Je commence à compter les heures potentielles de sommeil qu'il me reste. Je sais que mon repos est foutu. 3h00, j'entends de nouveau Monsieur Chien gémir. Je sais qu'il m'appelle. C'est dommage, je pense que j'étais enfin en train de m'endormir. Mais je me lève précipitamment : il n'a pas à subir ma flème. On se connaît tous les deux : quand il gémit la nuit, c'est qu'il n'est pas bien. Il m'a fait des coups de Trafalgar, une fois ou deux, mais généralement, c'est pas du pipeau : il doit être malade. Dans ma précipitation, j'entends mon homme maugréer. Je lui dis "t'inquiète, je m'en occupe" en quittant une fois de plus la chambre. J'enfile mon peignoir et mon manteau au dessus de ma nuisette et prends Monsieur Chien dans mes bras. Nous descendons tous les deux dans la rue. Bien sûr, il pleut. C'est la totale. Je m'en fous : effectivement, il avait vraiment besoin de sortir, et moi j'aime bien me balader dans les rues à ces heures indécentes : la ville est à moi. Nous remontons tous les deux un peu plus sereins. Je le remets dans son panier et le laisse s'assoupir enfin. En remontant dans la chambre, la voix de mon homme est plus distincte : "tu m'as ramené à boire ?" Bah non, je n'avais pas entendu. Il me demande pourquoi je me suis réveillée. Je lui réponds que je ne dormais pas. Il me dit :"quoi, à 3h00, c'est du n'importe quoi !" Je reste interdite, : qu'est-ce que je peux y faire ? Il me demandait justement hier matin pourquoi je ne prenais pas de somnifère, j'ai vraiment des nuits et un sommeil très agités. J'ai toujours connu ça. Je ne veux pas de médicament. Des larmes de fatigue coulent encore un peu. Mais je suis pleinement réveillée. J'entends son souffle à mes côtés. Il me prend machinalement dans ses bras. Je commence à m'apaiser. 4h42. C'est la dernière fois que je regarde le réveil cette nuit. J'ai enfin réussi à m'endormir. Mais c'est trop tard. La fatigue sera quand même là le lendemain. Le sommeil m'a juste permis de calmer mes pensées. 7h00 le réveil sonne. Il me réveille. Exceptionnellement mon homme se lève avant moi. Lui aura dormi 10h cette nuit. C'est bien. Moi 2h15 environ … Je suis complètement cassée, vidée. Même les mots et les gestes sont effort. Aujourd'hui je ne suis pas tout à fait sur la même planète que mes congénères. Je ne souhaite qu'une chose, c'est avoir relativement la paix. C'est décidé, je vais prendre plus soin de moi…